Atelier de la condamine (postures)

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Atelier de la condamine (postures)

En observant les différents portraits figurés dans l’atelier Rue de la Condamine et en les resituant par rapport aux artistes qui, de près ou de loin, faisaient partie du groupe des Batignolles, il est franchement difficile de savoir (mis à part Manet, Bazille et Maître), qui est qui, d’autant que, si tous, ou presque, sont présents, un artiste manque à l’appel : il s’agit de Fantin-Latour qui réalisera un portrait de ce groupe la même année.

(Bazille, peint par Fantin-Latour et Bazille, peint par Manet, dans son propre tableau)

(Bazille, peint par Fantin-Latour et Bazille, peint par Manet, dans son propre tableau)

Absence remarquée puisque Bazille, qui a pourtant posé pour le peintre dans une attitude semblable à celle où il figure dans son propre tableau, ne semble pas faire mention de cette relation. Quelle peut bien en être la raison?

Si je l’on s’en tient à la distribution des rôles que nous propose J-C. Bourdais, Zola (sur le départ) s’entretient avec Renoir (ou Sisley), Monet et Manet font face à Bazille et Maître joue du piano seul dans son coin ; on peut donc considérer que deux ensembles de personnes dialoguent en vis-à-vis (à gauche) et que une personne (à droite), seule, tourne le dos à tous.

Certes, Maitre est le seul musicien du groupe et on peut penser qu’il était bon de lui faire une place à part, mais la raison de cette mise à l’écart (« au coin » tout de même !) est tout de même un peu sévère (et sectaire), surtout lorsque l’on sait qu’il était le meilleur ami de Bazille. Là encore mystère !

En réfléchissant encore un peu sur cette partition (sans jeu de mot), j’en viendrais presque à me dire que si Zola (ou Astruc) n’était pas de la fête, cela arrangerait mes affaires car, à gauche, ne se trouveraient que des peintres (Sisley, Renoir, Monet, Manet…) et à droite, un musicien…

D’un autre côté, si c’est Monet qui taille une bavette avec Sisley ou Renoir, et donc que c’est Zola qui se trouve derrière Manet : ce n’est pas mal non plus (littérairement parlant, je veux dire*…).
Atelier de la condamine (postures)
Atelier de la condamine (postures)

Mais revenons à la toile peinte par Fantin-Latour où c’est Manet qui se trouve être en vedette, ce qui est assez compréhensible puisqu’il est le plus âgé de la bande. Assis devant son chevalet, il peint sous les regards attentifs (recueillis) de ses camarades, dont celui de Bazille. 

Rue de la Condamine les rôles sont inversés, sauf que le portrait de Bazille est de la main de Manet (entraide amicale ou leçon de peinture ?). Ces deux ateliers peints la même année ne racontent donc pas tout à fait la même histoire et l’on hésite même à croire qu’il s’agit là des mêmes personnes.

Là-bas, Bazille semblait méditer en silence devant le travail de son grand frère. Ici, Manet s’exprime (canne en main) devant l’ouvrage posé sur le chevalet (il s’autorise même une petite retouche !) : d’un côté une ambiance austère et quasi-mortifère (« on dirait des croque-morts » me dit l’une de mes filles), de l’autre un hall de gare où chacun défile, commente, discute et joue de la musique… 

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* - On sait l'appui qu'apporta Zola par ses écrits à Manet, tout au moins au début, (voir aussi le fameux portrait peint par Manet) 

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